Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 1.djvu/143

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D’un homme qu’autrefois Rome a vu son vainqueur ;
Et quoique sa fortune ait surmonté la mienne,
Les grands coups qu’Annibal a portés à la sienne
Doivent du moins apprendre aux Romains généreux
Qu’il a bien mérité d’être respecté d’eux.
Je sors ; je ne pourrais m’empêcher de répondre
À des discours qu’il est trop aisé de confondre.



Scène III

PRUSIAS, FLAMINIUS, HIÉRON


FLAMINIUS

Seigneur, il me paraît qu’il n’était pas besoin
Que de notre entretien Annibal fût témoin,
Et vous pouviez, sans lui, faire votre réponse
Aux ordres que par moi le Sénat vous annonce.
J’en ai qui de si près touchent cet ennemi,
Que je n’ai pu, Seigneur, m’expliquer qu’à demi.

PRUSIAS

Lui ! vous me surprenez, Seigneur : de quelle crainte
Rome, qui vous envoie, est-elle donc atteinte ?

FLAMINIUS

Rome ne le craint point, Seigneur ; mais sa pitié
Travaille à vous sauver de son inimitié.
Rome ne le craint point, vous dis-je ; mais l’audace
Ne lui plaît point dans ceux qui tiennent votre place.
Elle veut que les rois soient soumis au devoir
Que leur a dès longtemps imposé son pouvoir.
Ce devoir est, Seigneur, de n’oser entreprendre
Ce qu’ils n’ignorent pas qu’elle pourrait défendre ;