Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 1.djvu/60

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CLÉANDRE

l’arrête.

Mais où fuyez-vous ? Arrêtez donc vos pas.
Je suis prêt d’obéir ; eh ! ne me fuyez pas.

TOINETTE

Votre père pourrait, Madame, vous surprendre ;
Vous savez qu’il n’est pas fort prudent de l’attendre ;
Finissez vos débats, et calmez le chagrin…

CRISPIN

Oui, croyez-en, Madame, et Toinette et Crispin ;
Faites la paix tous deux.

TOINETTE

Quoi ! toujours triste mine !

CRISPIN

Parbleu ! Qu’avez-vous donc, Monsieur, qui vous chagrine ?
Je suis de vos amis, ouvrez-moi votre cœur :
À raconter sa peine on sent de la douceur.
Chassez de votre esprit toute triste pensée.
Votre bourse, Monsieur, serait-elle épuisée ?
C’est, il faut l’avouer, un destin bien fatal ;
Mais en revanche, aussi, c’est un destin banal.
Nombre de gens, atteints de la même faiblesse,
Dans leur triste gousset logent la sécheresse :
Mais Crispin fut toujours un généreux garçon ;
Je vous offre ma bourse, usez-en sans façon.

TOINETTE

Ah ! que vous m’ennuyez ! Pour finir vos alarmes,