Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 2.djvu/358

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ÉGLÉ.

Mais qu’est-ce que c’est que vous ? Est-il question de vous ? Je vous dis que c’est d’abord moi qu’on voit, moi qu’on informe de ce qu’on pense ; voilà comme cela se pratique, et vous voulez que ce soit moi qui vous contemple pendant que je suis présente !

ADINE.

Sans doute ; c’est la plus belle à attendre qu’on la remarque et qu’on s’étonne.

ÉGLÉ.

Eh bien, étonnez-vous donc !

ADINE.

Vous ne m’entendez donc pas ? on vous dit que c’est à la plus belle à attendre.

ÉGLÉ.

On vous répond qu’elle attend.

ADINE.

Mais si ce n’est pas moi, où est-elle ? Je suis pourtant l’admiration des trois autres personnes qui habitent dans le monde.

ÉGLÉ.

Je ne connais pas vos personnes, mais je sais qu’il y en a trois que je ravis et qui me traitent de merveille.

ADINE.

Et moi je sais que je suis si belle, si belle, que je me charme moi-même toutes les fois que je me regarde ; voyez ce que c’est.

ÉGLÉ.

Que me contez-vous là ? Je ne me considère jamais que je ne sois enchantée, moi qui vous parle.