Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 3.djvu/488

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vous donc que je la conduise pour vous persuader ? Je désespère de la pousser jamais plus loin ; j’ai vu l’amour naissant ; quand il sera grand garçon, j’aurai beau l’attendre auprès de la palissade, au diable s’il y vient badiner ; or, il grandira, au moins, s’il n’est déjà grandi ; car il m’a paru aller bon train, le gaillard.

LÉLIO

Fort bon train, ma foi.

TRIVELIN

Que dites-vous de la Comtesse ? Ne l’auriez-vous pas épousé sans moi ? Si vous aviez vu de quel air elle abandonnait sa main blanche au Chevalier !…

LÉLIO

En vérité, te paraissait-il qu’elle y prit goût ?

TRIVELIN

Oui, Monsieur. (À part.) On dirait qu’il y en prend aussi, lui. (À Lélio.) Eh bien, trouvez-vous que mon avis mérite salaire ?

LÉLIO

Sans difficulté. Tu es un coquin.

TRIVELIN

Sans difficulté, tu es un coquin : voilà un prélude de reconnaissance bien bizarre.

LÉLIO

Le Chevalier te donnerait cent coups de bâton, si je lui disais que tu le trahis. Oh ces coups de bâton que tu mérites, ma bonté te les épargne ; je ne dirai mot. Adieu ; tu dois être content ; te voilà payé.

Il s’en va.