Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/115

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L’article sur lequel nous en étions allait sans doute donner matière à une longue conversation entre nous, quand on ouvrit avec grand bruit la porte de la salle, et que nous vîmes entrer une dame menée, devinez par qui ? par M. de Climal, qui, pour premier objet, aperçut Marianne en face, à demi couchée sur un lit de repos, les yeux mouillés de larmes, et tête à tête avec un jeune homme, dont la posture tendre et soumise menait à croire que son entretien roulait sur l’amour, et qu’il me disait : je vous adore ; car vous savez qu’il était à mes genoux ; et qui plus est, c’est que, dans ce moment, il avait la tête baissée sur une de mes mains, ce qui concluait aussi qu’il la baisait. N’était-ce pas là un tableau bien amusant pour M. de Climal ?

Je voudrais pouvoir vous exprimer ce qu’il devint. Vous dire qu’il rougit, qu’il perdit toute contenance, ce n’est vous rendre que les gros traits de l’état où je le vis.

Figurez-vous un homme dont les yeux regardaient tout sans rien voir, dont les bras se remuaient toujours sans avoir de geste, qui ne savait quelle attitude donner à son corps qu’il avait de trop, ni que faire de son visage qu’il ne savait sous quel air présenter, pour empêcher qu’on n’y vit son désordre qui allait s’y peindre.