Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/241

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peut faire face à tout. Voyons comment la mienne me tira d’affaire.

Mme Dorsin répliqua encore quelque chose à Mme de Miran sur ce qu’elle venait de dire.

Cette dernière se leva pour s’en aller, et dit : Puisqu’il dîne demain chez vous, tâchez donc de le disposer à ce mariage. Pour moi, qui ne puis me rassurer sur l’aventure en question, j’ai envie, à tout hasard, de mettre quelqu’un après mon fils ou après son laquais, quelqu’un qui les suive l’un ou l’autre, et qui me découvre où ils vont : peut-être saurai-je par là quelle est la petite fille, supposé qu’il s’agisse d’elle, et il ne sera pas inutile de la connaître. Adieu, Marianne ; je vous reverrai dans deux ou trois jours.

Non, lui dis-je en laissant tomber quelques larmes ; non, madame, voilà qui est fini. Il ne faut plus me voir, il faut m’abandonner à mon malheur ; il me suit partout, et Dieu ne veut pas que j’aie jamais de repos.

Quoi ! que voulez-vous dire ? me répondit-elle ; qu’avez-vous, ma fille ? D’où vient que je vous abandonnerais ?

Ici mes pleurs coulèrent avec tant d’abondance que je restai quelque temps sans pouvoir prononcer un mot.

Tu m’inquiètes, ma chère enfant, pourquoi donc pleures-tu ? ajouta-t-elle en me présentant sa main comme elle avait déjà fait quelques moments auparavant. Mais je n’osais plus lui donner la mienne. Je me reculais honteuse, et avec des paroles entrecoupées