Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/343

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qu’à cause que je crus cela inutile ; et elle n’en aurait jamais su davantage, si quelques jours après, en parlant de ces hardes que je renvoyai, je n’avais pas par hasard nommé M. de Valville, chez qui je les fis porter, comme au neveu de la personne qui me les avait données. Voilà malheureusement comment elle vous connut, monsieur ; et je suis bien mortifiée de mon imprudence ; car pour de la malice, il n’y en a point eu ; je vous le dis en conscience ; je pourrais vous tromper, mais je suis trop pénétrée et trop reconnaissante pour vous rien cacher.

Dieu soit loué ! s’écria-t-il alors en adressant la parole au père Saint-Vincent ; actuellement ma sœur sait donc à quoi s’en tenir sur mon compte. Je ne le croyais pas ; c’est une confusion que j’ai de plus avant que je meure ; je sens qu’elle est grande, mon père, et je vous en remercie, mademoiselle ; ne vous reprochez rien, c’est un service que vous m’avez rendu ; ma sœur me connaît, et je vais rougir devant elle.

Je pensai faire des cris de douleur en l’entendant parler ainsi. Mme de Miran rentra avec Valville ; mes pleurs et mes sanglots la surprirent, son frère s’en aperçut : Venez, ma sœur, lui dit-il ; je vous aurais retenue tantôt, si je n’avais craint votre tendresse ; j’avais à dire des choses que vous n’auriez pas soutenues, mais je n’y perdrai rien, le père Saint-Vincent aura la bonté de vous les redire ; et grâces à Dieu, vous en savez déjà l’essentiel ; Mademoiselle vous a mise en état de me rendre justice. J’en ai mal usé avec elle ; le père Saint-Vincent me l’avait confiée ;