Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/345

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rester, et nous passâmes dans une salle où nous trouvâmes un intime ami de M. de Climal et deux parentes de la famille qui allaient entrer.

Valville les retint, leur apprit que le malade avait perdu toute connaissance, et qu’il fallait attendre ce qui en arriverait ; de sorte que personne n’entra qu’un ecclésiastique, qui était son confesseur, et que nous vîmes arriver.

Valville, qui était assis à côté de moi dans cette salle, me dit tout bas quelles étaient ces trois personnes que nous y avions trouvées.

Je parle de cet ami de M. de Climal, et de ces deux dames ses parentes, dont l’une était la mère et l’autre la fille.

L’ami me parut un homme froid et poli ; c’était un magistrat de l’âge de soixante ans à peu près.

La mère de la demoiselle pouvait en avoir cinquante ou cinquante-cinq ; petite femme brune, assez ronde, très laide, qui avait le visage large et carré, avec de petits yeux noirs, qui d’abord paraissaient vifs, mais qui n’étaient que curieux et inquiets ; de ces yeux toujours remuants, toujours occupés à regarder, et qui cherchent de quoi fournir à l’amusement d’une âme vide, oisive, et qui n’a rien à voir en elle-même. Car il y a de certaines gens dont l’esprit n’est en mouvement que par pure disette d’idées ; c’est ce qui les rend si affamés d’objets étrangers, d’autant plus qu’il ne leur reste rien, que tout passe en eux, que tout en sort ; gens toujours regardants, toujours écoutants, jamais pensants. Je les compare