Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/347

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je l’entendis ; les gens comme elle ne questionnent jamais aussi bas qu’ils croient le faire ; ils y vont si étourdiment, qu’ils n’ont pas le temps d’être discrets. C’est une demoiselle de province, et qui est la fille d’une des meilleures amies de ma mère, lui répondit Valville assez négligemment. Ah ! ah ! de province, reprit-elle ; et la mère est-elle ici ? Non, repartit-il encore ; cette demoiselle-ci est dans un couvent à Paris. Ah ! dans un couvent ! Est-ce qu’elle a envie d’être religieuse ? Et dans lequel est-ce ? Ma foi, dit-il, je n’en sais pas le nom. C’est peut-être qu’elle y a quelque Parente ? continua-t-elle. Elle est fort jolie, vraiment, très jolie ; ce qu’elle disait en entrecoupant chaque question d’un regard sur ma figure. À la fin elle se lassa de moi, et me quitta pour examiner le magistrat, qu’elle connaissait pourtant, mais dont le silence et la tristesse lui parurent alors dignes d’être considérés.

Voilà qui est bien épouvantable, lui dit-elle après ; cet homme qui se meurt, et qui se portait si bien, qui est-ce qui l’aurait cru ? Il n’y a que dix jours que nous dînâmes ensemble.

C’était de M. de Climal dont elle parlait. Mais dites-moi, monsieur de Valville ; est-ce qu’il est si mal ? Cet homme-là est fort, j’espère qu’il en reviendra, qu’en pensez-vous ? Depuis quand est-il malade ? Car j’étais à la campagne, moi, et je n’ai su cela que d’hier. Est-il vrai qu’il ne parle plus, qu’il n’a plus de connaissance ? Oui, madame, il n’est que trop vrai, répondit Valville. Et Mme de Miran est donc