Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/403

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relâcha ; de l’affliction je tombai dans la tristesse ; je ne pleurais plus, je me mis à rêver.

De quelle part me vient le coup qui me frappe ? me disais-je. Que pensera là-dessus Mme de Miran ? Que fera-t-elle ? N’est-ce point cette parente de mauvais augure que j’ai vu à mon couvent, qui est cause de ce qui m’arrive ? Mais comment s’y est-elle prise ? Mme de Fare n’entre elle pas dans le complot ? Quel dessein a-t-on ? Ma mère ne me secourra-t-elle point ? Découvrira-t-elle où je suis ? Valville pourra-t-il se résoudre à me perdre ? Ne le gagnera-t-on pas lui-même ? Ne lui persuadera-t-on pas de m’abandonner ? Mme de Miran n’a-t-elle consenti à rien, ou bien ne se rendra-t-elle pas à tout ce qu’on lui dira contre moi ? Ils ne me verront plus tous deux ; on dit que l’autorité s’en mêle ; mon histoire deviendra publique. Ah ! mon Dieu, il n’y aura plus de Valville pour moi, peut-être plus de mère.

C’était ainsi que je m’entretenais ; les religieuses qui m’avaient reçue n’étaient plus avec moi, la cloche les avait appelées au chœur. Une sœur converse me tenait compagnie, et disait son chapelet pendant que je m’occupais de ces douloureuses réflexions, que j’adoucissais quelquefois de pensées plus consolantes.