Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/415

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

êtes ici ; mais, quelque plaisir que je me fisse de vous obliger, c’est un service qu’il ne m’est pas permis de vous rendre. On a exigé que je ne me mêlerais de rien ; j’en ai moi-même donné parole, et j’en suis très fâchée.

Une religieuse, qui vint alors, abrégea notre entretien, et je retournai dans le jardin un peu moins abattue que je ne l’avais été en arrivant chez elle. Je vis un peu plus clair dans mes pensées ; je m’arrangeai sur la conduite que je tiendrais dans cette maison où l’on devait me mener le lendemain ; je méditai ce que je dirais, et je trouvais mes raisons si fortes, qu’il me semblait impossible qu’on ne s’y rendît pas, pour peu qu’on voulût bien m’écouter.

Il est vrai que les petits arrangements qu’on prend d’avance sont assez souvent inutiles, et que c’est la manière dont les choses tournent qui décide de ce qu’on dit ou de ce qu’on fait en pareilles occasions ; mais ces sortes de préparations vous amusent et vous soulagent. On se flatte de gagner son procès pendant qu’on fait son plaidoyer, cela est naturel, et le temps se passe.

Il me venait encore d’autres idées. Du couvent à la maison où l’on me transfère il y aura du chemin, me disais-je. Eh ! mon Dieu, si vous permettiez que Valville ou Mme de Miran rencontrassent le carrosse où je serai, ils ne manqueraient pas de crier qu’on arrêtât ; et si ceux qui me mèneront ne le voulaient pas, de mon côté, je crierais, je me débattrais, je ferais du bruit ; et au pis aller mon amant et ma