Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/434

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il est question. Fallait-il surmonter des difficultés presque insurmontables ; remédier à tel inconvénient presque sans remède ; procurer une gloire, un avantage, un bien nécessaire à l’Etat ; rendre traitable un ennemi qui l’attaquait, et que sa douceur, que l’embarras des temps où il se trouvait ou que la modestie de son ministère abusait, il faisait tout cela, mais aussi discrètement, aussi uniment, avec aussi peu d’agitation qu’il faisait tout le reste. C’était des mesures si paisibles, si imperceptibles ; il se souciait si peu de vous préparer à toute l’estime qu’il allait mériter, qu’on eût pu oublier de le louer, malgré toutes ses actions louables.

C’était comme un père de famille qui veille au bien, au repos et à la considération de ses enfants, qui les rend heureux sans leur vanter les soins qu’il se donne pour cela, parce qu’il n’a que faire de leur éloge ; les enfants, de leur côté, n’y prennent pas trop garde, mais ils l’aiment.

Et ce caractère, une fois connu dans un ministre, est bien neuf et bien respectable ; il donne peu d’occupation aux curieux, mais beaucoup de confiance et de tranquillité aux sujets.

À l’égard des étrangers, ils regardaient ce ministre-ci comme un homme qui aimait la justice et avec qui ils ne gagneraient rien à ne la pas aimer eux-mêmes ; il leur avait appris à régler leur ambition, et à ne craindre aucune mauvaise tentative de la sienne ; voilà comme on parlait de lui.

Revenons ; nous sommes dans sa chambre.