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Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/73

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Oh ! s’il me venait un dévot qui m’en contât, il me ferait des présents jusqu’à la fin du monde avant que je lui dise : Arrêtez-vous !

La naïveté et l’affection avec laquelle Mme Dutour débitait ce que je vous dis là valaient encore mieux que ses leçons, qui sont assez douces assurément, mais qui pourraient faire d’étranges filles d’honneur des écolières qui les suivraient. La doctrine en est un peu périlleuse : je crois qu’elle mène sur le chemin du libertinage, et je ne pense pas qu’il soit aisé de garder sa vertu sur ce chemin-là.

Toute jeune que j’étais, je n’approuvai point intérieurement ce qu’elle me disait ; et effectivement, quand une fille, en pareil cas, serait sûre d’être toujours sage, la pratique de ces lâches maximes la déshonorerait toujours. Dans le fond, ce n’est plus avoir de l’honneur que de laisser espérer aux gens qu’on en manquera. L’art d’entretenir un homme dans cette espérance-là, je l’estime encore plus honteux qu’une chute totale dans le vice ; car dans les marchés, même infâmes, le plus infâme de tous est