Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 6.djvu/94

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pour me déchausser ; ce qu’elle fit pendant que Valville et le chirurgien se retirèrent un peu à quartier.

Quand mon pied fut en état, voilà le chirurgien qui l’examine et qui le tâte. Le bon homme, pour mieux juger du mal, se baissait beaucoup, parce qu’il était vieux, et Valville en conformité de geste, prenait insensiblement la même attitude, et se baissait beaucoup aussi, parce qu’il était jeune ; car il ne connaissait rien à mon mal, mais il se connaissait à mon pied, et m’en paraissait aussi content que je l’avais espéré.

Pour moi, je ne disais mot, et ne donnais aucun signe des observations clandestines que je faisais sur lui ; il n’aurait pas été modeste de paraître soupçonner l’attrait qui l’attirait, et d’ailleurs j’aurais tout gâté si je lui avais laissé apercevoir que je comprenais ses petites façons : cela m’aurait obligé moi-même d’en faire davantage, et peut-être aurait-il rougi des siennes ; car le cœur est bizarre, il y a des moments où il est confus et choqué d’être pris sur le fait quand il se cache ; cela l’humilie. Et ce que je dis là, je le sentais par instinct.

J’agissais donc en conséquence ; de sorte qu’on pouvait bien croire que la présence de Valville m’embarrassait un peu, mais simplement à cause qu’il me