Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/174

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

étais sa fille.

Aussi l’oublia-t-elle si bien qu’il y avait quatre ans qu’il ne nous était venu de ses nouvelles, quand je perdis Mme Dursan, avec qui je n’avais vécu que cinq ou six ans ; et je les passai d’une manière si tranquille et si uniforme que ce n’est pas la peine de m’y arrêter.

Je vous ai déjà dit qu’on m’appelait la belle Tervire ; car dans chaque petit canton de province, il y a presque toujours quelque personne de notre sexe qui est la beauté du pays, celle, pour ainsi dire, dont le pays se fait fort.

Or, c’était moi qui avais cette distinction-là, que je n’ai pas portée ailleurs, et qui alors m’attirait quantité d’amants campagnards, dont je ne me souciais guère, mais qui servaient à montrer que j’étais la belle par excellence ; et c’était là tout ce qui m’en plaisait.

Non que j’en devinsse plus glorieuse avec mes compagnes ; je n’étais pas de cette humeur-là ; elles ont pu souvent n’être pas contentes de ma figure qui triomphait de la leur, mais jamais elles n’ont eu à se plaindre de moi ni de mes façons ; jamais ma vanité