Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/190

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Tu n’y songes pas ! me dit-elle. Pourquoi t’es-tu chargée de ce bijou ? À quoi veux-tu que je l’emploie ? Je ne pourrais le prendre pour toi, et je t’en ai donné de plus beaux (comme il était vrai). Non, ma fille, reprends-le, ajouta-t-elle tout de suite en me le rendant d’un air triste ; ôte-le de ma vue ; il me rappelle une petite bague que j’ai eue autrefois, qui était, ce me semble, pareille à celle-ci, et que j’avais donnée à mon fils sur la fin de ses études.

À ce discours, je remis promptement la bague dans le papier d’où je l’avais tirée, et l’assurai bien qu’elle ne la verrait plus.

Attends, reprit-elle, j’aime mieux. que tu proposes demain à ton jeune homme de lui prêter quelque argent, qu’il te rendra, lui diras-tu, quand il aura vendu son bijou ; voilà dix écus pour lui ; qu’on te les rende ou non ; je ne m’en soucie guère, et je les donne, quoiqu’il ne faille pas le lui dire.

Je m’en garderai bien, lui repartis-je en prenant cette somme qui était bien au-dessous de la générosité