Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/191

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que je me sentais, mais qui, avec quelque argent que je résolus d’y joindre, deviendrait un peu plus digne du service que j’avais envie de rendre ; car de l’argent, j’en avais ; Mme Dursan, qui, dans les occasions, voulait que je jouasse, ne m’en laissait point manquer.

Tout mon embarras fut de savoir comment je ferais le lendemain pour offrir cette somme au jeune homme en question sans qu’il en rougît, à cause de l’indigence des siens, ni qu’il pût entrevoir qu’on donnait cet argent plus qu’on ne le prêtait.

J’y rêvai donc avec attention, j’y rêvai le soir, j’y rêvai étant couchée. J’arrangeai ce que je lui dirais, et j’attendis le lendemain sans impatience, mais aussi sans cesser un instant de songer à ce lendemain.

Il arriva donc ; et ma première idées ; en me réveillant, fut de penser qu’il était arrivé.

J’étais avec Mme Dursan sur la terrasse du jardin, et nous nous y entretenions toutes deux assises après le dîner, quand on vint me dire qu’un jeune étranger, qui était dans la salle, demandait à me parler. C’est apparemment ton chasseur d’hier, me dit Mme Dursan ; va lui rendre sa bague, et tâche de l’amuser un instant ; je vais retourner dans ma chambre, et je serais, bien aise de le voir en traversant la salle.

Je me levai donc avec une émotion secrète que je n’attribuai qu’à la fâcheuse nécessité de lui remettre le diamant, et qu’à l’embarras du compliment que