Page:Marivaux - Œuvres complètes, édition Duviquet, 1825, tome 7.djvu/281

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mère, comme si ce geste avait dû la mettre au fait. Qu’est-ce que c’est ? ajouta-t-elle ; est-ce qu’elle se meurt ? Non, madame, lui dit alors la femme de chambre ; mais elle vient de reconnaître sa fille, et elle s’est trouvée mal. Oui, lui dis-je alors en m’efforçant de parler, c’est ma mère.

Votre mère ! s’écria-t-elle encore en approchant pour la secourir. Quoi ! la marquise de… ! Quelle aventure !

Une marquise ! dit à son tour l’aubergiste, qui joignait les mains d’étonnement ; ah ! mon Dieu, cette chère dame ! Que ne m’a-t-elle appris sa qualité ? Je me serais bien gardé de lui causer la moindre peine.

Cependant, à force de soins, ma mère insensiblement ouvrit les yeux et reprit ses esprits. Je passe le récit de mes caresses et des siennes. Les circonstances attendrissantes où je la retrouvais, la nouveauté de notre connaissance et du plaisir que j’avais à la voir et à l’appeler ma mère, le long oubli même ou elle m’avait laissée, les torts qu’elle avait avec moi et cette espèce de vengeance que je prenais de son cœur par les tendresses du mien ; tout contribuait à me la rendre plus chère qu’elle ne me l’aurait peut-