Page:Marivaux - Théâtre, vol. I.djvu/211

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Arlequin.

Ne me trompez-vous pas ? Est-il sûr qu’on est exilé quand on médit ?

Le Seigneur.

Cela arrive assez souvent.

Arlequin.

Allons, voilà qui est fait, je m’en vais médire du premier venu, et j’avertirai Silvia et Flaminia d’en faire autant.

Le Seigneur.

Et la raison de cela ?

Arlequin.

Parce que je veux aller en exil, moi. De la manière dont on punit les gens ici, je vais gager qu’il y a plus de gain à être puni qu’à être récompensé.

Le Seigneur.

Quoi qu’il en soit, épargnez-moi cette punition-là, je vous prie. D’ailleurs, ce que j’ai dit de vous n’est pas grand’chose.

Arlequin.

Qu’est-ce que c’est ?

Le Seigneur.

Une bagatelle, vous dis-je.

Arlequin.

Mais voyons.

Le Seigneur.

J’ai dit que vous aviez l’air d’un homme ingénu, sans malice ; là, d’un garçon de bonne foi.

Arlequin, riant de tout son cœur.

L’air d’un innocent, pour parler à la franquette ; mais qu’est-ce que cela fait ? Moi, j’ai l’air d’un innocent ; vous, vous avez l’air d’un homme d’es-