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Page:Marmontel - Mémoires de Marmontel - M. Tourneux, Lib. des biolio., 1891, T3.djvu/49

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plus variée, plus soutenue dans ses accens, et je vous prierai de la noter comme je vous la déclamerai. — Eh bien ! me dit-il, nous verrons. » Ainsi fut formé le dessein de donner au récitatif cette facilité, cette vérité d’expression, qui fut si favorable au jeu de la célèbre actrice à qui le rôle de Didon étoit destiné.

Le temps nous pressoit j’écrivis très rapidement le poème ; et, pour dérober Piccini aux distractions de Paris, je l’engageai à venir travailler près de moi dans ma maison de campagne : car j’en avois acquis une très agréable, où nous vivions réunis en famille dans la belle saison. En y arrivant, il se mit à l’ouvrage ; et, lorsqu’il l’eut achevé, l’actrice qui devoit jouer le rôle de Didon, Saint-Huberty, fut invitée à venir dîner avec nous. Elle chanta son rôle d’un bout à l’autre à livre ouvert, et l’exprima si bien que je crus la voir au théâtre.

Elle alloit faire un voyage en Provence : elle voulut y emporter son rôle pour l’étudier chemin faisant ; et, pendant son absence, on s’occupa des répétitions. Ce fut dans ce temps-là que j’essuyai cette maladie qui me mit au bord du tombeau. Quand vint le moment de me rendre à Fontainebleau, je n’étois pas encore bien rétabli, et ma femme, inquiète sur ma convalescence, voulut m’accompagner.