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Page:Marmontel - Mémoires de Marmontel - M. Tourneux, Lib. des biolio., 1891, T3.djvu/50

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Ce fut là qu’en dînant chez Mme de Beauvau nous entendîmes parler pour la première fois des vues qu’on avoit sur moi pour cette place de secrétaire de l’Académie, que d’Alembert avoit rendue si difficile à remplir après lui.

Cette difficulté, dont l’homme le plus vain auroit pu être intimidé, n’étoit pas la seule qui me retînt. La place demandoit une assiduité dont je me croyois incapable. C’étoit donc bien sincèrement que je me refusois à l’honneur qu’on vouloit me faire ; mais on m’opposa des motifs auxquels je crus devoir me rendre, et il fut décidé que je serois du nombre des aspirans à cette place. Seulement je me réservai de ne pas la solliciter.

La circonstance m’étoit favorable pour les suffrages de la cour. Le succès de Didon y fut complet[1] ; et aux éloges que l’on donnoit à la musique de Piccini on mêloit aussi quelques mots de louanges pour l’auteur du poème. « C’est le seul opéra, disoit le roi, qui m’ait intéressé. » Il le redemanda deux fois.

Ce, succès me fut très sensible ; ma femme en jouissoit, et c’étoit là pour moi l’objet le plus intéressant. Le voyage eut pour elle un agrément

  1. Didon, tragédie lyrique en trois actes, représentée à Fontainebleau le 16 octobre 1783, et, sur le théâtre de l’Opéra, le 1er décembre suivant. Selon M. Th. de Lajarte, Didon fut jouée deux cent cinquante fois de 1783 à 1826.