Page:Marot - Les Œuvres, t. 5, éd. Guiffrey, 1931.djvu/38

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Et quand j’euz bien viré, et reviré
Dedans mon Lict, et beaucoup souspiré,
Je priay fort Amour, qui m’assailloit,
Laisser dormir mon esprit, qui veilloit :
Mais lors Amour de rigueur m’a usé :
Car le dormit du tout m’a refusé,
Me commandant de composer, et tistre
Toute la nuyct ceste petite Epistre,
Pour au matin ung peu vous conforter
Du dueil, qu’hersoir il vous convint porter.
Or ay je faict le sien commandement :
Si vous requiers (ma Maistresse) humblement,
Que vostre Cueur tant noble, et gracieux
Chasse dehors tout ennuy soucieux.
En le chassant, le mien vous chasserez :
Priant Amour, qu’en tous lieux, où serez,
Vienne plaisir, et tristesse s’enfuye,
Et que Vieillard jamais ne vous ennuye.

XIII

L’esloignement, que de vous je veulx faire,
N’est pour vouloir m’exempter, et deffaire
De vostre amour, encor moins du service :
C’est pour tirer mon loyal cueur sans vice
Du feu, qui l’ard par trop grand amytié :
Et est besoing, qu’il treuve en moy pitié,
Veu que de vous pour toute recompense.
N’a que rigueur, et mieulx trouver n’y pense :
Car de vous n’ay encor ouy responce,
Qui ung seul brin de bon espoir m’anonce.