Page:Marquiset,À travers ma vie,1904.djvu/39

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constamment à mes parents que si leur rêve se réalisait jamais, elles se chargeraient plus tard de me placer d’une manière convenable. Ah ! les promesses !

Mlles de Richelieu retournèrent à Paris lorsque Bonaparte eut rétabli la paix intérieure, et les lettres écrites à cette époque prouvent combien Mme de Montcalm en particulier avait de tendresse pour ma mère.

Pour prix de son dévouement à la royauté, M. de Chevrand fut nommé, au début de la Restauration, agent comptable du dépôt d’étalons établi à Besançon. C’était le seul but de ses modestes désirs, aussi Mme de Montcalm lui obtint facilement cet emploi. Ce bon fou, que j’ai encore connu dans toute la force de l’âge et dans toute la fougue de ses opinions, faisait enrager les patriotes pendant la Révolution ; il était de tous les clubs, y portait la parole, se moquait effrontément des idées en vogue et persiflait sans cesse et partout les partisans du nouveau régime, dont il était la bête noire.

Chevrand, c’était l’austérité même, sous l’indulgence, la naïveté des montagnards franc-comtois. Longtemps ballotté par les événements de la Révolution, émigré, jeté d’un bord à l’autre, il était comme ces rudes pierres de nos montagnes que les tempêtes ont roulées dans le torrent, que le torrent a limées et polies pendant des siècles, qui sont devenues luisantes et douces au toucher, mais qui n’en restent pas moins pierres sous la surface qui les adoucit.

Mêlé à des aventures et à des hommes divers, il