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LIOLA

Ah ! que de fois, tous deux — par de calmes soirées,
Leurs humides regards comme fixés au ciel,
Plongeant dans l’infini — cherchaient un autre monde
Qui pût leur rendre un jour ceux qu’ils avaient perdus !
Quels doux épanchements dans leur douleur profonde !
Ô soupirs de deux cœurs en un seul confondus !
Et, quand de l’aube aux cieux brillait la blanche flamme,
Des oiseaux Liola grondait le joyeux chœur :
« Pourquoi donc le jour, quand la nuit est dans mon âme ?
Pourquoi la vie ? ô mort, n’es-tu pas dans mon cœur ! »
Et sa voix exhalait ainsi ses tendres plaintes,
Et tout ce qui vivait lui parlait du tombeau :
Dans l’azur lumineux les étoiles éteintes,
Comme on souffle au matin un pâlissant flambeau ;
Et, sous les pleurs du soir, chaque fleur parfumée
Penchant sa frêle tête ainsi que pour dormir.

Souvent, près d’elle assis, sous l’épaisse ramée,
Lionel ne pouvait s’empêcher de frémir,