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LIOLA

Est-ce que la nature est aussi dans l’attente ?
Veut-elle compatir au cruel coup du sort ?

Cependant le jongleur est entré dans sa tente.
Elle paraît en feu : de la fumée en sort,
Comme monte des toits de bleuâtres spirales ;
Puis bientôt elle tourne ainsi qu’un tourbillon
Et laisse dans la nuit entendre d’affreux râles.
Tout à coup le jongleur, rougi de vermillon,
Le cou ceint de serpents, un hibou sur la tête,
S’avance, brandissant une torche en sa main.
Que va-t-il déclarer ? Comme la foule prête
L’oreille à chaque mot du jongleur inhumain !
« Je l’ai vu, » leur dit-il, « le manitou terrible !
Mes regards, pénétrant les ombres de la nuit,
Ont rencontré son œil étincelant, horrible.
Trônant sur son rocher il jouissait du bruit
Dont la vague en hurlant l’acclamait au passage.
Son front avec la brume allait se perdre aux cieux
Et pour exciter des flots l’écumante rage