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la vis et l’hérault

bosquets, les forêts, la verdure, ne sont rien ; où la pierre, l’eau vive et le soleil sont tout ; où l’homme aussi n’est rien ou peu de chose ; par des jardins arides, des murs d’enclos, des moulins, des maisons que le temps a dorées ou brunies et qui sont de loin semblables au roc. Le fleuve y descend de rapide en rapide, entre deux parois à pic ou de surplomb, pur, et parfois si serré qu’en dessus de certains gouffres muets un vigoureux sauteur essayerait de le franchir[1]. La fin de ce pas est au Gouffre Noir, sous le pont du Diable, en aval de la cascade de Clamouse, qui jette sur son onde immobile une fontaine du rocher : il passe alors, par 45 mètres d’altitude, dans une large vallée, domaine de la vigne et du poudreux olivier. » (O. Reclus.)

Dans cette vallée reposent Aniane (1,582 hab. la comm., 2,135 aggl.), dont la célèbre abbaye de bénédictins fut fondée en 708 par saint Benoît, fils du comte de Maguelonne ; Gignac, Clermont-l’Hérault ; mais le causse et le cañon ont disparu, et devant l’olive et la poussière notre sujet nous ramène au nord.

L’autre route, de Ganges à Aniane, nous intéresse moins encore, car dès Saint-Bauzille dépassé elle ne voit plus du tout l’Hérault : elle contemple cependant à l’est le dernier ressaut des Cévennes, le « superbe pic Saint-Loup, aux vertigineux précipices », qui, haut de 633 mètres, troue la plaine

Ravin des Arcs : un gour. — Phot. Chabanon.

comme une corne de 400 mètres de saillie. Une chapelle et les restes d’une tour de Cassini couronnent sa crête aiguë, d’où la vue est belle. Sa crête orientale porte, à 294 mètres d’altitude, les ruines importantes du château de Montferrand, des cachots duquel, au Moyen Âge, « on sortait pour être envoyé aux galères, banni du royaume ou pendu[2]». À

  1. Ces gorges, absolument impraticables à tout bateau, même au Crocodile, sont moins belles que celles de Puéchabon situées en amont. (V. supra.) — Le moulin de Glamouse existait en 1122. — On construit en ce moment, à partir de la source de Cabrier, un canal d’irrigation (1888-1892), large de 3m,50 à 5 mètres, long de 56 kilomètres, dont les tranchées et remblais gâtent tout le paysage. Il doit arroser les campagnes d’Aniane et de Gignac.
  2. V. J. Pouchet, Excursion au pic Saint-Loup : Soc. languedocienne de géographie, t. III, nos  5 et 6, décembre 1880, 35 p. et pl.