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fitent de la moindre plate-forme. Dans beaucoup de ces jardins minuscules, la terre végétale a été apportée sur la tête des propriétaires, pelletée par pelletée, dans des sacs. D’autres fois, entre des fissures, poussaient quelques herbes : on les a arrachées pour semer des amandes. La roche, nue il y a un siècle, a vu se développer ainsi une véritable forêt d’amandiers. D’après les statistiques officielles, c’est près de 1,000 hectolitres d’amandes que l’on récolte aujourd’hui dans cette grande conque rocheuse, semblable, au printemps, quand les pêchers et amandiers sont épanouis, à une immense corbeille de fleurs !

Cette récolte forme une des grandes ressources du pays.

Le très ancien pont de Sainte-Énimie a été rebâti en 1706. L’inondation terrible de 1873 l’a respecté, ainsi que celui de Quézac ; sur plus de 80 kilomètres, le Tarn emporta tous les autres.

C’est ici que la route de Mende à Meyrueis et au Vigan franchit la rivière avant de remonter sur le causse Méjean.

Le pont est à 480 mètres d’altitude ; le rebord du Sauveterre, à 973 et 943 mètres ; celui du Méjean, à 1,009, 1,022 et 1,097 mètres, soit 500 à 600 mètres de creux pour 1,500 à 2,400 mètres d’écartement au sommet.




CHAPITRE II

le cañon du tarn. — de sainte-énimie à la malène.


Navigation sur le Tarn. — Pentes du Tarn et du Rhône. — Les barques et leur manœuvre. — En bateau ou à pied ? — La citadelle du causse Méjean. — Saint-Chély. — Le lac souterrain de la Cénarète. — Baumes de Pougnadoires. — Pas de l’Escalette. — Château de la Caze. — Bassin de Hauterive. — La Malène.


La route de voitures venant de Florac s’arrête à Sainte-Énimie (1889) ; si l’on ne veut continuer à pied, le moyen de transport change, et c’est aux bateliers qu’il faut se confier pour la suite de l’excursion.

Le mode de locomotion ajoute dès lors beaucoup aux charmes du voyage ; aucune route carrossable n’a pu trouver place encore à côté de la rivière[1], et c’est en barque que l’on descend pendant 35 kilomètres, c’est-à-dire pendant un jour et demi, tantôt doucement flotté sur les planiols ou plaines d’eau profonde et calme, où le Tarn prend des airs de grand lac, tantôt rapidement entraîné par le courant sur le lit caillouteux des ratchs ou rapides.

Sainte-Énimie est à 480 mètres d’altitude, et le confluent de la Jonte à 385 mètres, soit 95 mètres de dénivellation et 2m,71 de pente par kilomètre. Aussi, dès 1644, un savant géographe trop peu connu, le sieur Coulon, écrivait-il : « Le Tarn descend des montagnes des Cévennes parmy les rochers et les préci-

  1. Une route nationale du Rozier à Florac (route nationale no 107 bis de Millau à Alais) par le cañon est votée et à l’étude depuis 1881 : en 1888, le premier coup de pioche de cette voie n’avait pas encore été donné ! Actuellement elle est en cours d’exécution.