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Page:Martin - Histoire des églises et chapelles de Lyon, 1908, tome I.djvu/79

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saint-bruno des chartreux

des dessins : puis ce nom disparaît. Les historiens disent que vraisemblablement par faute d’entente avec le prieur, il se retira et que les derniers travaux furent exécutés par Soufflot ; on attribuait même à Soufflot la construction du dôme ; d’autres ont nié absolument sa participation à l’œuvre de l’église. La vérité est entre ces deux extrêmes : on trouve ces trois mentions de Soufflot dans les archives du couvent ; il dirigea et régla le travail du serrurier Mallet qui fournit, en 1743, les ferrures employées dans la partie supérieure du baldaquin ; il dessina les cadres des tableaux de Trémolière ; il donna à un sieur Boudard, en 1746, le dessin des deux anges en carton-pierre, placés au côté du grand autel, l’un tenant un encensoir, l’autre en attitude d’adoration. Le dessin était d’un maître, l’exécution fut déplorable : le prieur jugea que Boudard avait été téméraire en espérant faire son apprentissage aux dépens des Chartreux. Enfin, dernier détail, il y a une quittance signée de Soufflot pour 600 fr. reçus au compte de Hallé et de Frontier, auteurs de deux tableaux qui ne sont pas décrits ; le tableau de Hallé fils, surintendant des Gobelins, est sûrement celui qui représente le baptême de Notre-Seigneur actuellement dans la chapelle des Fonts baptismaux.

Pour terminer ce qui concerne les tableaux remontant à cette période de la décoration de l’église, il faut signaler deux toiles encore, œuvre de Brenet : la première est une mise du Christ au tombeau, dans la troisième chapelle à droite, la seconde relative à un fait historique. Pendant la construction du dôme, un orage menaça d’enlever toute la charpente et les échafaudages dressés pour l’assembler : un religieux du couvent, en grande réputation de sainteté, se mit en prières et l’orage s’apaisa soudain.

Dans la cinquième reprise de la construction, de 1733 à 1738, les Chartreux avaient dépensé environ 100.000 fr. On ne sait pas le chiffre des dépenses pendant les dix années qui suivirent ; des donateurs étaient venus à leur aide ; le Consulat donna 5.000 fr., et accorda la franchise annuelle des droits d’entrée de cent ânées de vin ; les chartreuses de France et celles de Séville envoyèrent 13.000 fr. ; mais il fallut se séparer de quatre grands et quatre petits vases d’argent, de beaux candélabres de laiton vendus à Castres 2.500 fr. et enfin contracter un emprunt de 50.000 fr. Au prix de tous ces sacrifices, nos religieux avaient voulu offrir au Maître qu’ils servaient une demeure qui ne fût pas trop indigne de lui ; ils avaient ainsi réalisé la pensée des échevins de 1590, quand ils obtenaient d’eux la permission de construire, par cette considération que les édifices à élever « seraient autant de décorations et embellissements à la ville ». Le prieur dom Prenel jouit de son œuvre jusqu’à l’époque de sa mort, en 1758. Dans l’Obit, note mortuaire que le monastère de la Grande-Chartreuse adresse à tous les religieux de l’ordre, on trouve ces mots élogieux pour notre prieur : « Il a magnifiquement restauré le temple du Seigneur ».

Un demi-siècle n’était pas écoulé, que la Révolution venait chasser les Chartreux de Lyon et s’emparer de leurs biens. Lors du rétablissement du culte, l’église, qui n’avait pas été aliénée par la commune, devint église paroissiale sous le vocable de Saint-Bruno ; mais, avant même le Concordat, un religieux capucin, le P. Archange, avait