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nir, la règle de conduite de l’heure présente et les motifs d’espérance. Cette règle, ces motifs, ce secret, il les a résumés en une page prophétique : « Il nous faudra un siècle ou deux pour nous asseoir, et, d’ici là, nous oscillerons entre un despotisme illimité et une liberté mal réglée, comme ces balles suspendues à un fil, qui décrivent de longues courbes en sens divers jusqu’à ce que peu à peu elles demeurent immobiles à leur centre de gravité. Il faut nous y résigner.

« Heureux ceux qui ne désespéreront pas et qui, selon leurs forces et leurs temps, travailleront avec patience à l’avènement de ce siècle futur où la civilisation chrétienne s’étendra sur les cinq parties du monde, et y établira le règne d’une liberté sincère sous une autorité respectée. Ce siècle est loin, mais il viendra. Je ne croirai jamais que Dieu se soit fait homme, soit mort ici-bas, et nous ait laissé l’Évangile, pour aboutir au triste spectacle que présente le monde depuis dix-huit cents ans.

« Nous n’avons vu que l’ébauche ; notre postérité verra la statue. Le travail est long parce que le but est grand, et que deux forces, la Providence divine et la liberté humaine y concourent dans d’égales proportions Je vis porté dans une espérance qui arrête mes mépris, je compatis et je pardonne beaucoup, l’œil fixé sur un avenir qui remplit mon âme. »


SAINT-DENIS-LA-CROIX-ROUSSE

Avant la Révolution, la Croix-Rousse, qui relevait de la seigneurie de Cuire, ne constituait pas une unité paroissiale. Son territoire dépendait, par portions inégales, des paroisses Saint-Pierre et Saint-Saturnin, Notre-Dame de la Platière et Saint-Vincent. Placées au bas du coteau et dans l’enceinte de la ville, ces églises se trouvaient non seulement éloignées, mais encore d’un accès pénible pour les habitants du plateau. À ces difficultés inhérentes à la situation du faubourg, s’ajoutait un obstacle particulier à la ligne des remparts établis à la fin du xvie siècle et qui ne devaient disparaître qu’à notre époque : à savoir la fermeture des portes qui, s’opérant chaque soir au coucher du soleil, rendait impossible, pendant la durée de la nuit, l’administration des sacrements aux malades et aux moribonds.

Cet état de choses, douloureux aux sentiments de foi de la population, prit fin par la fondation, à la Croix-Rousse, en 1624, d’un couvent d’Augustins-Déchaussés. L’installation de ces religieux n’alla pas d’abord sans rencontrer de nombreuses difficultés. Ce ne fut qu’après de longues négociations qu’ils parvinrent à obtenir le droit de quêter dans la ville, sans lequel leurs efforts demeuraient voués à l’impuissance. Grâce enfin à l’appui de l’archevêque, en considération surtout de l’absence des secours religieux dont souffrait le faubourg, les Augustins reçurent les autorisations nécessaires et, sans délai, se mirent à l’œuvre. Dès ce moment, l’aide de généreux bienfaiteurs permit d’entreprendre la construction du monastère. La première pierre de l’édifice fut posée le jour des Rameaux,