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histoire des églises et chapelles de Lyon

thumes furent plus considérables encore ; il décéda le 30 décembre 1646, au second étage de sa maison d’habitation, située au bas de la montée du Gourguillon, et la lecture de son testament fournit la preuve manifeste de son désintéressement et de son bon cœur. Son patrimoine modeste, fruit de ses économies, comprenait avec un capital de quelques milliers de francs deux maisons, celle qui lui servait de logement, et une autre voisine de Saint-Nizier, à l’angle de la Fromagerie ; son mobilier, qu’il interdit d’inventorier, se composait d’un petit lot d’argenterie, d’une tapisserie de prix, de tableaux estimés ; il donna ses livres aux Pères Jésuites de la Trinité, en faveur de leurs écoliers pauvres ; destina douze cents francs aux Recteurs de la Charité, pour l’apprentissage de six garçons et la dot de six orphelines, spécifia d’autres legs de piété et de souvenir, et institua héritiers universels, à part égale, le chapitre de Fourvière, les perpétuels de Saint-Jean et l’Hôtel-Dieu.

La durée de son canonicat, qui ne se prolongea pas moins de trente-quatre ans, permit à Claude Ferrier d’assister à la naissance du pieux mouvement, qui porta tout à coup les habitants de Lyon à choisir Fourvière pour le rendez-vous de leurs dévots pèlerinages, et à le considérer, peu à peu, comme l’endroit où la Mère de Jésus se plaisait à se montrer la plus propice à leurs prières, à leurs souffrances et à leurs vœux. Il en fut le témoin ; il le favorisa de tout son pouvoir.

D’où cette inspiration populaire est-elle partie ? Quels faits notoires, saisissants, merveilleux, éveillèrent l’attention de nos concitoyens et changèrent en un courant continu, qui n’a pas cessé d’aller en augmentant, depuis quatre siècles, les rares visites de passants en promenade et en quête d’un magnifique panorama ? Aucun historien n’a réussi à percer l’obscurité de ces commencements, où l’instinct de la foule chrétienne découvrit si juste et si vite la source de miséricordes et de grâces, que la Providence lui avait ménagée. Je n’ignore pas qu’embarrassés, pour assigner une cause déterminante à ces hommages spontanés, qui transformèrent si favorablement les destinées de l’humble collégiale, des auteurs préfèrent les placer, dans une antiquité beaucoup plus reculée, et imaginer qu’ils ont été contemporains de l’érection même du sanctuaire. Afin de rendre la dévotion plus vénérable encore, et plus traditionnelle, s’il est possible, sans prendre assez garde qu’on lui ôte même jusqu’à l’apparence de l’authenticité, on vieillit indéfiniment la chapelle, sans une preuve, sans une vraisemblance. On la date au moins de Charlemagne, sinon de l’empereur Constantin, et on la remplit, dès sa première heure, d’une multitude de fidèles, échappés au fer des Sarrazins, ou aux fouets des proconsuls et des licteurs. On n’a point osé cependant appuyer cette fragile hypothèse sur de complaisants et fabuleux parchemins. Les titres sérieux, au contraire, ne varient pas : dans les registres et dans le fonds entier du Chapitre, que j’ai dépouillés, avec le soin le plus scrupuleux, aux Archives départementales du Rhône, on ne recueille pas une seule fois, en une seule ligne, une allusion si dubitative soit-elle, qui enlève à Olivier de Chavannes et à Jean de Bellesme la paternité d’une œuvre, que le premier créa, en laissant au second le soin de l’organiser.

D’après les aveux sans artifice des chanoines eux-mêmes, selon le texte de leur secrétaire, ils éprouvèrent un vif étonnement, lorsque la solitude de leurs offices et de leurs