Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/130

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lez ? » cria M. Thibault, qui, cette fois, ne se retenait plus. Il tourna vers le prêtre un nez agressif : « Vais-je interrompre sans raison un traitement qui produit déjà d’excellents effets ? Reprendre chez moi ce garnement ? Pour être de nouveau à la merci de ses incartades ? Merci bien ! » Il crispait ses poings à faire craquer les jointures, et sa mâchoire serrée lui faisait une voix rauque : « En toute conscience, je dis non, non et non ! »

D’un geste calme de ses deux mains, l’abbé sembla dire : « Comme vous voudrez. »

M. Thibault, d’un coup de reins, s’était levé. Le sort de Jacques se décidait une seconde fois.

— « Mon cher abbé », reprit-il, « je vois qu’il n’y a pas à causer sérieusement avec vous ce matin, et je m’en vais. Mais laissez-moi vous dire que vous vous montez l’imagination ni plus ni moins qu’Antoine. Est-ce que j’ai l’air d’un père dénaturé ? Est-ce que je n’ai pas tout fait pour ramener cet enfant au bien, par l’affection, l’indulgence, le bon exemple, l’influence de la vie familiale ? Est-ce que je n’ai pas supporté de