Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/132

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Il avait traversé le vestibule suivi de l’abbé silencieux.

— « Allons, à bientôt, mon cher », lança-t-il avec rondeur lorsqu’il fût sur le palier.

Il se retournait pour une poignée de mains, lorsque soudain, sans autre préambule :

— « Deux hommes montèrent au temple pour prier », commença l’abbé d’une voix songeuse. « L’un était pharisien et l’autre publicain. Le pharisien, se tenant debout, faisait cette prière en lui-même : “ Mon Dieu, je vous rends grâce de ce que je ne suis pas comme le reste des hommes. Je jeûne deux fois la semaine et je distribue aux pauvres le dixième de mon bien. ” Le publicain, de son côté, se tenant à l’écart, n’osait pas lever les yeux vers le ciel, mais se frappait la poitrine, disant : “ Mon Dieu ayez pitié de moi, car je ne suis qu’un pêcheur ” ».

M. Thibault entr’ouvrit les paupières : il aperçut son confesseur, debout dans l’ombre du vestibule, et qui portait son index à ses lèvres :

— « Celui-ci, je cous assure, s’en alla justifié, et non pas l’autre : car quiconque s’élève sera humilié, et quiconque s’humilie sera élevé. »