Page:Martin du Gard - Le Pénitencier.djvu/55

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je ne sais pourquoi, que tu ne sois pas bien traité ici… »

Jacques le considéra avec surprise, et sourit. Antoine ne quittait pas son frère des yeux :

— « Alors, vrai, entre nous, tu ne te plains de rien ? »

— « De rien »

— « Tu ne veux pas que je profite de ma visite pour obtenir quelque chose du directeur ? »

— « Quoi donc ? »

— « Je ne sais pas, moi. Cherche. »

Jacques parut réfléchir, sourit à nouveau et secoua la tête :

— « Mais non. Tu vois, tout est très bien. »

Sa voix n’était pas moins transformée que le reste : une voix d’homme, chaude et grave, bien timbrée quoique sourde, et assez inattendue dans ce corps d’adolescent.

Antoine le regardait.

— « Comme tu es changé… On ne peut même pas dire que tu aies changé : tu n’es plus le même, plus du tout, en rien… »

Il ne détachait pas son regard de Jacques, cherchant à retrouver, dans cette physiono-