Page:Martinaud - Lettre d'un jeune prêtre athée et matérialiste à son évêque le lendemain de son ordination.djvu/12

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En résumé, dans la spéculation : prudence, droiture ; dans l’action : vie, amour, et pour couronnement de l’édifice, la plus grande source de bonheur relatif dont l’homme est, capable ; voilà quel est le cortége de l’athéisme et du matérialisme.

Est-ce là, Monseigneur, cette hydre que vous vous plaisez à peindre sous de si noires couleurs ?


Mais vous avez beau faire, votre règne est passé ; celui de la science commence. Elle aura bientôt triomphé sur toute la ligne : À quelques préjugés près, qui ne peuvent pas sitôt disparaître, parce que, comme je l’ai dit plus haut, ils sont trop enracinés, mais qui s’évanouiront eux aussi, vos vieilles superstitions perdent tous les jours du terrain. Vous n’avez guères plus pour vous que ceux qui ne savent pas lire ; et ceux-là mêmes vous seront bientôt ravis, car ils apprendront. La ruine de votre superbe édifice est presque un fait accompli ; et ce qu’il y a là de plus curieux, c’est que, commencée par vous, continuée par vous, elle se consommera aussi par vous. Vous êtes à vous-mêmes vos plus terribles ennemis ; car tous vos efforts vont à établir que pour être des vôtres, il faut cesser d’être raisonnable.

Gendarmez-vous donc contre la science ; fulminez encore quelque bon anathème ; réunissez vos conciles ; achevez de montrer qu’entre elle et vous, toute conciliation est impossible. Oui, vous vous détruirez vous-mêmes ; vous serez broyés sous les roues du char que vous voulez arrêter. Ou, pour vous parler le langage d’un de vos hiérophantes : Rassemblez-vous de tous les coins de l’univers et vous serez battus ; ourdissez des complots pour les voir avorter ; faites des menaces qu’aucun effet ne suivra ; car Dieu est avec nous. (Is. VIII. 9-10.)