Page:Martinaud - Lettre d'un jeune prêtre athée et matérialiste à son évêque le lendemain de son ordination.djvu/6

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guage[1]. Aucune puissance au monde ne m’empechera de mettre mes paroles en harmonie avec mes convictions.

Ce n’est pas cependant pour me faire un nom, que je me déclare athée. Il est pour arriver à la gloire, vous le savez bien, Monseigneur, des chemins beaucoup plus faciles à suivre. Si je parle, c’est dans un but d’utilité publique, c’est pour montrer comment on s’affranchit.

Vous ne croyez pas aux athées, ou du moins vous affectez de ne pas y croire ; vous en faites des impossibilités, pour vous donner plus beau jeu contre eux. Tout ce que vous voulez bien leur accorder, c’est le désir de trouver vraies leurs assertions. Ne vous ai-je pas entendu dire, dans une circonstance, que vous n’aviez pas rencontré un incrédule dans votre vie ? Vous vouliez dire sans doute, Monseigneur, que vous n’en aviez pas rencontré seulement un. Dans tous les cas, celui que je vous présente aujourd’hui, je puis vous le garantir ; il a, je vous assure, plus que l’envie de devenir ce qu’il dit être.

Non, l’athéisme n’est pas une vaine forfanterie. C’est la protestation de tout ce qu’il ya d’intime et de sérieux dans la conscience humaine, contre ce qu’il y a au monde de plus puéril : la superstition et le fanatisme. Être athée, ce n’est pas non plus une révolte audacieuse contre un être suprême, ce n’est pas un attentat contre la Société. Être athée, c’est affirmer les conquêtes de la science, qui a banni dieu du monde, en montrant que son rôle y était impossible, qui, en dévoilant les sources de l’idée de dieu, a fait voir combien elles étaient suspectes. Être athée, c’est prendre place parmi les amis les plus sincères

  1. Vanini, philosophe napolitain, brûlé à Toulouse en 1619 comme athée, par des juges qui ne le comprenaient même pas.