Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/185

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gnie eut bien voulu employer ses bons offices pour me faire participer aux mêmes faveurs que je crois mériter par mon zèle, mes attentions et mes services, ainsi que par les obstacles que j’ai eu à vaincre et même par le nombre de jaloux que je me suis fait depuis que je travaille en chef. Ajoutez, s’il vous plaît, que, né d’une famille qui de temps immémorial s’est soutenue avec honneur, fils et frère de directeur de la Compagnie, j’avais plus de droit d’y aspirer que tout autre. Je vois avec douleur que tout a été oublié. Je me trompe ; votre intention, Messieurs, est sans doute que je doive ces faveurs à votre pure bonté. J’y consens volontiers ; il ne sera plus question de mes services passés. La grâce que vous m’accorderez sera purement gratuite et, pour le prouver à toute la terre, mon zèle pour votre service redoublera plus que jamais. »

Cette lettre est intéressante à plus d’un titre. L’homme s’y révèle tout entier, avec la connaissance de sa valeur poussée jusqu’à l’infatuation, et, comme l’a fort bien dit Cultru, « le ton même de la supplique et cette infatuation presque naïve ne pouvaient que confirmer le ministre et les directeurs dans l’idée que Dupleix était aussi inquiet et jaloux qu’il était actif et intelligent[1]. »

Dupleix communiqua à son frère sa lettre à la Compagnie par l’intermédiaire de Godeheu qui rentrait à ce moment en France, et, naturellement, il l’accompagna de quelques commentaires. Il commence par dire avec une réelle franchise que l’affaire des roupies dont il parle au début n’a été pour lui qu’un prétexte pour mettre en lumière les services qu’il a rendus. Il ne les a pas exagérés, et compte beaucoup sur son frère pour les faire valoir auprès du Contrôleur Général et de Fulvy, en vue de la récompense à laquelle il a droit. Dumas, qu’on vient de couvrir d’honneurs, n’est pour rien dans l’obtention du

  1. Cultru, p. 164.