Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/264

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rolland, Barthélémy, Ravet et le teneur des livres lui-même, un nommé Weymar, de faire remarquer que, puisqu’il pouvait rester cette somme en caisse, il était surprenant qu’on eut passé des billets aux marchands pour une somme de 300.000 roupies, qu’il fallait qu’il y eut de la manigance et des fonds détournés et que cela n’avait pu se faire que de concert avec St -Paul et Renault, tous deux garde-magasins. Ce conte, débité d’abord à l’oreille, fit impression chez quelques-uns et l’on prit jour pour examiner le bilan d’abord chez Barthélémy, puis chez un cabaretier nommé Lasonde. Il y eut plusieurs réunions. Soigneusement enfermé dans une pièce où les yeux indiscrets ne pouvaient pénétrer, on examina les livres et rien ne parut plus clair à ces gens qu’un détournement, dont Dupleix aurait été le bénéficiaire. Et l’on fit des notes que Weymar fut chargé de communiquer en douceur au conseiller St -Paul. À leur vue, celui-ci ne put s’empêcher de dire qu’elles étaient fausses, que l’on s’était trompé et qu’on avait oublié des pièces essentielles au débit du bilan. Comme Weymar insistait pour soutenir la justesse de ces notes, cet acharnement fit penser à St -Paul qu’il y avait là un mauvais dessein caché, et sans discuter davantage avec Weymar, il courut prévenir Dupleix. Celui-ci sans perdre un instant assembla tous les employés sans en excepter aucun et la plume à la main, il discuta avec eux le bilan. Ce dernier portait encore la trace du vin qu’on avait bu chez Barthélémy et chez Lasonde ; Dupleix en fit la remarque en même temps qu’il produisit sa justification. Ils furent confondus. « Ils ont été assommés, écrivait Dupleix, et déclarés les plus grands fourbes qui sont sur la terre[1]. »

  1. B. N. 8982 ; p. 101, 202, lettres à Dumas du 2 août 1739 et 10 janvier 1740 ; p. 206, lettre aux directeurs du 14 janvier 1740.