Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 1.djvu/430

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piastres ; or il fallait communément 105 piastres pour égaler 240 roupies siccas. Cette somme de piastres répondait à la valeur intrinsèque de 219 roupies ½ siccas, mais les changeurs n’en accordaient guère au delà de 208, avec un bénéfice de 5 %[1].

Il eut été par conséquent de notre intérêt de faire fabriquer des roupies siccas pour notre propre compte, en portant directement nos matières ou espèces aux Monnaies du prince[2]. Nous y songions depuis longtemps. Déjà en son rapport de 1727 dont nous avons parlé plus haut, Dupleix avait signalé l’utilité d’obtenir ce privilège. Mais il ne pensait pas qu’on put y arriver sans de grandes difficultés :

« On doit être persuadé, écrivait-il, que le vice-roi de ce royaume ne le permettra qu’après avoir reçu de gros présents. Un de ses plus grands revenus est la fabrication des roupies siccas ; tout l’argent que l’on porte au Bengale en piastres et matières, est porté à cette monnaie. Les envois d’ici en roupies causeraient une diminution de ses revenus, qu’il croira ne pouvoir réparer que par un présent considérable, qu’il faudrait sans doute renouveler à chaque mutation de vice-roi, et l’on ne doit pas douter que les Anglais ne fassent leurs efforts auprès de celui du Bengale pour que le cours de nos espèces nous soit refusé. Le seul moyen de nous tirer de tous ces embarras serait de s’adresser au Grand Mogol… Cette négociation peut facilement se faire pour Bengale ; l’on est beaucoup plus à portée de la cour qu’ici et, prenant la précaution d’envoyer à Chandernagor un mémoire bien circonstancié sur les offres et présents qu’on pourrait faire de la part de la Compagnie, cette affaire

  1. Tels sont les chiffres donnés par Samuel Ricard, dans son Traité général du Commerce paru en 1799 ; il est possible sinon probable qu’ils aient été un peu différents en 1738 ; mais le principe était le même et la différence devait être peu sensible.
  2. Il en avait trois : Mourchidabad. Rajmahal et Dacca.