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Mir Mohamed Oussen n’avaient agi que suivant leurs inspirations ; il s’aperçut aussi que Balagirao et Ragogy Bonsla, en dépit du traité dont il avait été le médiateur, s’apprêtaient à nouveau à attaquer le Décan. La situation était critique : Bussy ne pouvait songer à une concentration de nos forces, soit en rappelant Jainville, — c’eut été exposer la vie du soubab, — soit en allant le rejoindre ; il fallait d’abord assurer la solde de notre armée. Mais il ne fut nullement ému et très tranquillement il résolut de conduire au port le vaisseau dont il avait repris à contrecœur le commandement. Avant de gagner la haute mer, il louvoya d’abord au milieu des écueils, et c’est seulement quand il eut pris le large qu’on reconnut que jamais son génie n’avait été aussi sûr, aussi prudent, aussi habile ni aussi résolu. Il ne fit aucune fausse manœuvre et finit par ramener à Aurengabad sous les plis de notre drapeau la nef indécise qui portait nos destinées.

Le 2 juillet, il écrivait à Moracin :

« Puisque j’ai tant fait de revenir prendre le commandement de nos troupes, je ferai en sorte que mon retour n’aboutisse pas à sortir honteusement du Décan, mais le plus grand et en quelque sorte unique embarras est le moyen de faire subsister notre armée sans être obligé de recourir inutilement tous les mois comme des suppliants à ceux-là même qu’on a dessein de subjuguer… »

Voilà plus de six mois, qu’on entendait ce langage, sans que nos troupes eussent jamais été payées autrement que par des moyens de fortune : il fallait en finir. Ce fut à quoi Bussy s’appliqua exclusivement. Le 10 juillet, il adressa à Dupleix un long mémoire, intitulé : Mémoire instructif sur l’état politique des Maures et des Français dans le Décan et sur leurs intérêts réciproques.

Ce mémoire est d’une importance capitale parce qu’il