Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 4.djvu/167

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procédé de la sorte, ce n’était point par égoïsme ; il avait cédé à deux considérations. La première était de ne pas éveiller trop ouvertement les susceptibilités des Anglais. Nul doute qu’ils eussent été moralement autorisés à se plaindre et que leur réclamation eut eu plus de poids en Europe, si les circars avaient été directement cédés à la Compagnie dans les mêmes conditions que Mazulipatam et Condavir ; grâce au subterfuge adopté, il serait toujours possible de soutenir que les circars non seulement n’appartenaient pas à la Compagnie de France, mais relevaient à peine de Bussy lui même, puisqu’il était toujours loisible au soubab de se passer du concours de nos troupes et par suite de nous reprendre le pays qu’il ne nous avait accordé que pour leur entretien. Bussy se gardait bien d’ajouter que, si cette éventualité venait à se produire, il n’abandonnerait pas la place sans une sérieuse résistance.

Cette première raison n’était que pour sauver les apparences ; la seconde était plus solide. Si Bussy avait tenu à paraître en nom dans la cession des circars, c’est qu’il estimait cette condition indispensable pour exercer son autorité et par suite celle de la France auprès du soubab et même auprès du Mogol. Alors qu’il était le maître de la politique à Aurengabad et que rien ne s’y faisait sans ses ordres ou son consentement, il n’était pas convenable qu’on put le considérer comme un zéro à la côte ; personne n’eut compris cette antinomie. Dans tous les territoires dépendant du soubab, son autorité seule devait être reconnue.

Ce raisonnement visait Moracin, qui, durant les séjours de Bussy à la cour du soubab, devait administrer les provinces en son nom. Malgré leur amitié, il était à craindre que, la question d’attributions s’en mêlant, le premier