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cette lettre, si intéressants soient-ils ; on notera seulement la surprise de la Compagnie de n’avoir reçu aucune lettre de Dupleix depuis le départ du Dauphin. Ce navire avait quitté Pondichéry le 19 février 1752, l’événement de Trichinopoly s’était produit le 12 juin ; Saunders en avait informé sa compagnie le 5 juillet ; les journaux de Londres en avaient parlé le 6 janvier 1754 ; pourquoi Dupleix n’avait-il pas écrit, au besoin par voie étrangère ou par celle de Bassora et du désert de Syrie[1] ?

Ce fut ce retard qui acheva de perdre Dupleix, en donnant l’impression que nous avions subi en Asie un désastre qu’il n’osait avouer. Les lettres qui arrivèrent peu de temps après calmèrent les inquiétudes mais apprirent en même temps que, loin de vouloir souscrire à des négociations qui eussent été engagées en de mauvaises conditions, Dupleix s’apprêtait à continuer la guerre plus vigoureusement que jamais.

C’est alors que l’on songea pratiquement à envoyer Godeheu dans l’Inde comme commissaire du roi. On était en mars et Godeheu n’avait pas quitté Paris. Machault, désireux d’en finir avec les troubles de la péninsule, le fit pressentir par Silhouette sur la mission qu’il avait l’intention de lui confier.

« Je combattis cette proposition de tout mon pouvoir, nous dit Godeheu dans sa Réfutation de 1764 (p. 117) ; le choix me faisait honneur, mais il ne me flattait pas ; ma santé n’était pas forte. Pouvais-je ambitionner d’aller rétablir le commerce dans des comptoirs endettés de sommes immenses, d’aller porter la paix dans un séjour où tout était en combustion, ou d’y continuer la guerre avec des troupes excédées, réduites à la plus affreuse misère, et soulevées contre nous-mêmes ; en un mot

  1. Dupleix n’écrivit que le 15 octobre 1752, par le premier navire en partance pour la France.