Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 4.djvu/471

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

elle n’en a pas moins une saveur propre : les anecdotes manquent trop dans la vie de Dupleix. La lettre est datée de Gingy, 21 janvier 1755 :

« L’on s’est bientôt aperçu du vide que vos musiciens ont fait à la colonie. Personne ainsi que moi tout le premier n’est d’humeur de jouer la comédie. L’on ne se voit plus à l’heure accoutumée où l’on avait l’honneur de vous faire sa cour, instant que l’on passait avec tant de plaisir. Enfin tout est triste et le sera longtemps. Il y a cependant eu un bal masqué que M. Godeheu a donné à sa fête dans votre grande salle d’audience. Je n’y ai jamais rien vu de si beau lorsqu’elle fut illuminée. Il fit placer au milieu votre beau fanal qui seul était capable de l’éclairer, en outre des bougies le long de la balustrade d’en haut et le buffet à la place où était votre concert. Le tout avait un éclat et une magnificence dont votre bon goût faisait tous les frais. Une seule chose qui me fit de la peine ce fut d’y voir piquer les carreaux qui étaient si polis sous prétexte d’y danser plus à l’aise. » (B. N. 9162, p. 45).

Les regrets causés par le départ de Dupleix perdirent un peu de leur vivacité par suite de l’arrivée de Duval de Leyrit, que sa connaissance de l’Inde rendait moins hostile aux idées de son ancien chef ; à ce moment, nous dit le P. Lavaur, une partie de la ville était prête à déserter. Néanmoins Leyrit était d’un caractère trop faible pour faire oublier son prédécesseur ; nul ne croyait qu’il put rétablir la situation de jour en jour plus compromise par les exigences des Anglais et l’on continua de désirer le retour de Dupleix, avec une impatience, qui pour être moins vive, n’en était pas moins réelle et profonde. Au commencement de 1756, le P. Lavaur lui écrivait que l’on continuait plus que jamais à croire à son prochain retour : il était désiré de tout le monde. Ces espérances subsistaient encore en