Page:Martineau - Dupleix et l’Inde française, tome 4.djvu/93

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naient au sud, Holkar qui était aux environs d’Aurengabad s’emparerait de cette ville et que si elles continuaient vers le nord elles mourraient de faim.

Mais, ce que ne disaient ni Goupil ni Romi kh., c’est que grâce à la faiblesse du commandement, la discipline s’était fort relâchée parmi les soldats et même parmi les officiers. Ceux-ci passaient leur temps à l’amour ou au jeu : des femmes s’étaient introduites dans le camp, où elles étaient publiquement affichées. Le P. Monjustin, aumônier de l’armée, s’en affligeait au nom de la morale et menaçait de se retirer à Pondichéry si le scandale continuait. Les officiers se moquaient naturellement de ces objurgations et plusieurs s’entendaient pour entretenir en commun des concubines dans leurs tentes. Il fallut que, sous les menaces réitérées du P. Monjustin, Dupleix se résolut au rôle de censeur et rappelât à Pondichéry les plus indociles. Les malheureuses femmes furent chassées de l’armée.

Les Indiens s’habituèrent ainsi à avoir de moins en moins de considération pour nos troupes ; l’auréole dont Bussy les avait entourées se dissipait peu à peu à la lumière crue des faiblesses humaines. Autant que le relâchement des mœurs, le départ de plusieurs officiers qui avaient obtenu d’importantes gratifications produisit le plus mauvais effet auprès des ministres du soubab. Notre dévouement n’était donc qu’une question d’argent ou de salaire ! Dupleix craignait que la Compagnie en France n’en tirât également des conclusions fâcheuses pour notre réputation. « Que dira-t-elle de voir retourner en Europe tous ceux qui dans une couple d’années ont fait fortune ? Je sais ce qu’elle pense déjà à ce sujet. Cette conduite fera grand tort à l’avenir aux autres. »

Aussi le soubab était-il plein de mélancolie. Privé de