Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/186

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servoit n’étoient que pour nous intimider et nous forcer à ce traité dont eux-mêmes ils avoient besoin. Une anecdote assés singulière que je me rappelle au sujet de cette visite me confirme dans cette idée. Ayant tourné la conversation sur le chapitre de Souradjotdola, sur les sujets de crainte qu’il nous avoit donnés ainsi qu’aux Chets, sur ses violences, etc., je leur dis que je voyois bien où ils en vouloient venir, que leur dessein étoit sûrement de faire un autre nabab. Les Chets, au lieu de nier, se contentèrent de me dire à voix basse que c’étoit une chose dont il ne falloit pas parler. Omichande, agent des Anglois et qui, par parenthèse, crioit « tolle » contre eux, étoit présent. Si le fait avoit été faux, les Chets sans doute l’auroient nié et m’auroient fait des reproches de tenir un pareil propos. Si les Chets avoient pensé même que mon dessein eût été de les contrebarer, ils eussent encore nié ; mais ces banquiers calculant tout ce qui s’étoit passé, les vexations du nabab, notre refus obstiné de le secourir, s’imaginoient que nous serions aussi satisfaits qu’eux de le voir déposé, pourvu toutefois que les Anglois nous laissassent tranquilles. Les Chets ne nous regardoient donc pas encore comme ennemis, et pouvoient être dans la bonne foy en disant que les Anglois ne nous attaqueroient pas. Mais les hostilités une fois commencées, que pouvoient faire les Chets ? Se brouiller avec les Anglois étoit se perdre. Étoit-il difficile à eux de