Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/203

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dre les armes à toute la troupe. J’avois depuis plusieurs jours des chariots sur lesquels étoient chargées nos munitions. Je me disposai à partir avec le peu de fonds qui me restoit à moi et à divers particuliers. L’homme du nabab voyant ma résolution et craignant de faire quelque chose qui ne fut pas approuvé, différa l’exécution de ses ordres et donna avis au nabab de ce qui se passoit. Il fit réponse qu’il ne vouloit pas absolument que je quittasse la loge, et donna ordre qu’on renvoyât les beldars (pioniers), mais en même tems il me fit dire qu’il falloit absolument que je fisse abattre moi-même ces ouvrages ; que, dans les circonstances présentes, il étoit obligé de faire bien des choses à contre-cœur ; qu’en refusant d’obéir j’allois attirer les Anglois sur lui et sur nous ; que n’étant pas en état de nous deffendre, il falloit plier ; que je ne serois plus désormais inquiété, et que par la suite il me donneroit tout l’argent nécessaire pour construire en briques ce que je voulois faire en terre. Je connoissois bien la valeur des promesses du nabab ; mais j’avois à le ménager. Le parti d’abandonner tout à fait la loge ne me convenoit pas ; je mis donc à l’ouvrage tous les pionniers que j’avais. Dans la nuit même, tout fut abattu. L’idée des Anglois étoit [sans doute] de nous mettre tellement hors de défense que nous fussions obligés de nous rendre dès qu’il leur prendroit envie de nous attaquer. Ils avoient déjà reçu un renfort de vingt cinq hommes et plusieurs