Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/303

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les brames en général sont aussi ignorants que la multitude ; cela vient de ce que ceux qui étudient la nature, et qui ont pénétré dans quelques uns de ses secrets, ne cherchent que les moyens d’en profiter pour tromper le peuple et s’attirer leur vénération. Pour y parvenir il est nécessaire que le mystère ne soit confié qu’à très peu de personnes. Par exemple, on doit être surpris d’entendre tous les brames prédire immanquablement une éclipse, et cependant, demandez leur ce que c’est qu’une éclipse, ils vous feront tous l’histoire absurde d’un dragon qui veut dévorer le soleil ou la lune. Pour éviter ce malheur il faut avoir recours aux ablutions, aux charités, il faut, disent ils, se purifier dans la rivière, et faire beaucoup de bruit pour épouvanter le dragon. L’éclipse passée, ils ont grand soin de faire entendre au peuple, que sans toutes ces cérémonies, le dragon n’auroit pas quitté prise. Au fond, le commun des brames n’en sait pas plus que le peuple, mais ils ont entre les mains une suite d’éclipse[s] calculées pour quelques milliers d’années, travail dû à quelques brames réellement savans, dont ils abusent pour tirer avantage de l’ignorance de la multitude. Leur système est que sans cela, le peuple ne pourroit être bien gouverné ; ainsi l’on ne doit pas être surpris des excès où les emporte l’astrologie judiciaire qu’ils ont poussée jusqu’au dernier degré de folie. L’almanach composé par leurs