Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/304

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brames a une planette, ou un génie particulier, non seulement pour chaque jour mais encore pour chaque heure, chaque minute et chaque action. Rien ne se fait sans le consulter, et pour former ce qui s’appelle le moment heureux, il faut le concours de je ne sais combien de circonstances favorables. Certains jours sont bons pour marcher dans le nord ; d’autres jours sont pour aller au sud ; certains jours sont tellement remplis ou occupés par les mauvais génies qu’il faut absolument s’abstenir de toute affaire. Lorsqu’après bien des consultations faites dans toutes les règles, on prend enfin son parti ou se croit au moment d’agir, s’il survient un coup de tonnerre, voilà tout dérangé, toutes les résolutions sont anéanties, quelque chose que puisse dire l’almanach et vous remarquerez que les Mahométans ne sont pas plus sensés là dessus que les Gentils ; ils ont aussi leurs astrologues, de sorte qu’entre Mahométans et Gentils, il y a pour le moins la moitié de l’année perdue par les mauvais génies. Le principal astrologue est de tous leurs conseils, rien n’est entrepris sans son avis, et son veto est tout aussi efficace que pouvoit l’être celui d’un tribun dans le sénat de Rome. L’opinion qu’on y a attachée le rend, en effet, de la plus grande conséquence. Un général qui s’aviseroit de faire marcher l’armée contre le sentiment de l’astrologue, seroit tout aussi condamnable que le général romain qui engagea le combat,