Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/315

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’honneur, la crainte, l’espérance, tous ces motifs puissants, assaisonés de quelques prises d’opium qu’on a soin de lui faire prendre, la font passer par cette épreuve terrible avec un courage qui paroit au dessus de l’humanité.

Dans quelques parties de l’Inde, lorsque le raja vient à mourir, non seulement ses femmes se brûlent, mais son médecin même est obligé d’en passer par là ; aussi lorsque le raja commence à vieillir, on le laisse souvent se soigner lui même.

Ce n’est pas dans les femmes seules qu’on remarque ce courage à affronter la mort ; les hommes en donnent quelquefois des exemples. On verra un brame, ou même un homme fort au dessous qui se croira deshonnoré, et obligé de perdre sa caste, on le verra s’ouvrir le ventre d’un coup de couteau, et mourir à la porte de celui qui l’a maltraité. On a vu souvent des pères et mères, dans l’impuissance de se venger, avaler du poison et se punir eux mêmes de l’affront fait à leur famille par la violence des Mahométans. C’est un double crime, disent-ils, qu’ils rejettent sur le coupable, et que la divinité ne laisse jamais impuni. Les punitions corporelles ne font rien à un gentil pourvu qu’elles n’attaquent point son honneur établi sur les principes de sa religion. Les gouverneurs maures savent bien tirer parti de cette façon de penser, lorsqu’ils veulent tirer de l’argent d’un gentil ; il souffrira mille coups de fouet, plutôt que de découvrir son trésor, mais si sa