Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/333

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

la première ceux qui aspirent au pouvoir ou à la fortune, et la seconde ceux qui y sont parvenus. Les premiers sont braves, actifs, vigilans, entrepreneurs, et assez fidèles à leurs engagemens ; mais une fois parvenus à leur but, on diroit qu’ils n’ont tant recherché les biens que pour en abuser. Les charmes du sérail les désarment ; ils s’abandonnent aux plaisirs et semblent ne s’engraisser que pour servir de victimes à de nouveaux venus qui auront les mêmes qualités qu’ils avoient eux mêmes, mais qu’ils ont perdues. »

Ce que je viens de dire, tant sur les gentils que sur les maures, regarde toute l’Inde en général, mais plus particulièrement les habitans de la presqu’isle et ceux du Bengale. Du reste, on peut dire que la bravoure est une qualité assez naturelle à presque tous les maures et même à quantité de gentils. Y a-t-il rien de plus brave que les Rajepoutes, les Djates, les Talingas, et quantité d’autres ? Les Maures et les Gentils qui ont été quelque tems au service des Européens en qualité de sipayes prouvent bien ce que je dis. Dans combien d’occasions ne se sont-ils pas distingués ? Cependant ce sont des gens qui, avant d’entrer au service ne paroissoient pas valoir mieux que les autres. Je nomme courage une élévation de sentimens que fait naître la vue du danger accompagnée de l’espérance de le surmonter quelque grand qu’il soit ; c’est, dit M. de Montesquieu, le sentiment de nos propres forces. Je n’appelle pas courage le motif