Page:Martineau - Mémoire sur quelques affaires de l'Empire Mogol (Jean Law de Lauriston 1756-1761), 1913.djvu/345

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de poësies, il y en a qui ne parlent pour ainsi dire, qu’en vers, et qui savent admirablement appliquer au sujet les plus beaux passages des poètes Arabes et Persans. C’est dans le dorbar, surtout, qu’ils brillent. Ce mot revient à ce que nous nommons audience. Le prince, les nababs, les ministres ont leur dorbar qui se tient tous les jours de la semaine, excepté le vendredi, et quelquefois matin et soir ; il dure trois ou quatre heures. C’est là qu’on se rend régulièrement pour faire sa Cour, et j’avoue que je ne connois pas d’assemblée qui ait l’air plus respectable. Si c’est chez le prince, tout le monde est debout arrangé en ligne ; partout ailleurs on est assis ; on forme un grand cercle, ou plusieurs, selon l’affluence. Tous les bras sont croisés, les yeux fixés sur celui qui préside ; la gravité, la décence avec lesquelles tout se passe inspire un respect qu’exigeroit, malgré vous, le seul coup d’œil de toutes les physionomies dont la noblesse naturelle tire un nouvel éclat de l’habillement, surtout dans les dorbars du nord, où l’on ne voit presque que des Mogols, Persans, ou Patanes qui sont blancs, et qui ont tous la barbe noire et longue. Un nouveau présenté ne peut paroître les mains vuides. Il faut qu’il donne le Nazer qui consiste en quelques roupies d’or ou d’argent, suivant ses moyens. Dans certains jours de cérémonie, tout le monde donne le nazer, et le seigneur à qui on l’offre, ne le refuse jamais. S’il le refusoit, surtout d’un homme qui seroit particulièrement